Pourquoi vous semblait-il important de consacrer un ouvrage aux néo-nazis et à l’ultra droite française en 2015 ?
Jacques Leclercq – Cette sortie m’apparaissait justifiée pour plusieurs raisons. Premièrement, parce qu’il y a de nombreux meurtres et attentats imputables à cette mouvance, dans d’autres pays et sur d’autres continents, et il aurait été dommageable d’oublier que nous avions également “nos” néo-nazis, ou suprémacistes vantant le “White power”.
Quels sont les points communs à cette mouvance ultra-radicale ?
Ce qui réunit cette mouvance réside dans le rejet de l’immigration (sous notamment la forme de “l’ethno-différentialisme”), certains courants évoquant la remigration indispensable à leurs yeux pour faire face au “Grand remplacement”, le tout sous la forme d’un racisme plus ou moins affiché et affirmé pour les plus radicaux, qui veulent que les blancs restent majoritaires en Europe, “maîtres chez nous”.
Cette extrême droite radicale vous paraît-elle présenter un risque terroriste ?
Il y a bien un risque potentiel de dérive terroriste. Pas tant au niveau des groupes disposant d’une vie légale, et pouvant en conséquence être suivis par les services concernés, mais plutôt par des mini-groupuscules agissant semi-clandestinement ou dans la clandestinité tout court. Comme toute addiction, le fait de s’abreuver au quotidien de discours de plus en plus haineux, de s’adonner à la visite de sites où l’on ne parle que de violences, avec des illustrations très fortes, parfois allant jusqu’à représenter des hommes et femmes en armes, avec des (simulacres ?) d’exécutions, d’innombrables scènes de combats, il y aura bien des restes de cette banalisation.
Et des “loups solitaires” sont toujours possibles… ou téléguidés par des groupes qui lâcheront leur ancien “camarade” quand il se fera arrêter. D’ailleurs, l’ex-Œuvre française ne s’y est pas trompée, mettant dans la balance avec leur dissolution le véritable risque qu’ils ne puissent suivre certains de leurs anciens membres éparpillés et ne pouvant ainsi respecter les consignes de leur direction, qui stipulera qu’ils dégagent depuis toute responsabilité en cas de dérapage. Certains esprits malins ne déclarent volontairement pas leur groupe, cela en faisant des “associations de fait” que l’on ne peut attaquer en justice, ni dissoudre.
Les Inrocks