Un instituteur retraité de Doullens a été condamné ce jeudi à quatre mois avec sursis pour incitation à la haine raciale.

On imagine Jean-Claude, 66 ans, étaler ses feuilles et ses stylos sur la toile cirée et entreprendre, une à une, la rédaction des vingt « billets d’humeur » qu’il distribuera, « au hasard » jure-t-il, en mai et juin 2015, dans des boîtes à lettres de Bertangles et Villers-Bocage, communes des environs d’Amiens. Ni ordinateur, ni même photocopieuses dans cette affaire, car Jean-Claude est de l’ancienne école, au propre comme au figuré, puisqu’il fut instituteur.
Pas de chance pour lui : un habitant de Bertangles, musulman, portera plainte contre lui et un autre, de Villers-Bocage, relèvera son numéro d’immatriculation. Pour le reste, Jean-Claude a couché noir sur blanc la logorrhée décomplexée qui s’affiche sur internet ou se proclame au coin du zinc.
« Ma France, tu es devenue le pays des burqas, proclame-t-il. Les rappeurs drogués ne sont pas interdits de chanter, moi je risque six mois de prison (NDLR : en fait, cinq ans). La France rastaquouère, c’est maintenant. Elle est devenue le pays des femmes voilées, des hordes de migrants qu’on nourrit avec l’agent pris dans les poches des Français. Le pays des djellabas, des voitures brûlées, des règlements de compte. Amiens Nord ressemble à Ouagadougou. L’Africanie arrive : un pays tout neuf, tout noir et musulman. »
Mais il prévient : « Je ne suis pas raciste, je suis patriote. Par exemple, je n’aime pas non plus les Anglais ».
Le procureur Pierre Jost l’interroge sur une référence à « quatre milliards d’Africains qui se reproduisent comme des lapins ». « D’abord, on ne compare pas des êtres humains à des lapins. Ensuite, il y a 1,2 milliard d’habitants en Afrique ». « Personne ne sait le vrai chiffre », répond Jean-Claude. « Allez, mettons même deux, on est loin de quatre ! », conclut le parquet.
Sur le fond, le procureur estime qu’il y a bien « provocation à la discrimination », dès lors que le prévenu « présente les Africains et les musulmans comme un bloc d’individus indifférenciés », ou quand ses diatribes accusent de tous les maux « musulmans et Africains, eux seuls et tous sans exception ». Il requiert 5 000 euros d’amende et la privation des droits civiques. Jugement : quatre mois avec sursis.
Courrier Picard