
Sebastian Kurz
Sebastian Kurz
La nouvelle législation augmente le nombre de fidèles nécessaires pour devenir une religion d’Etat, de 20 000 à 50 000. Elle a pour but d’empêcher l’islam, qui compte 2 000 adeptes dans le pays, d’accéder à ce statut dans un avenir proche.
Une demande de reconnaissance de l’islam comme religion officielle en Suisse est loin de trouver une majorité auprès des citoyens helvétiques, révèle un sondage publié dimanche.
Seules 39% des personnes interrogées approuveraient une telle mesure. A la question de savoir s’il est judicieux de placer l’islam au même niveau que le christianisme et le judaïsme en Suisse, 61% des sondés répondent «non» ou «plutôt non», indique une enquête du Matin Dimanche et de la SonntagsZeitung. Dix-neuf pour cent disent «oui» et 20% «plutôt oui».
Une majorité de 62% des Suisses estiment que l’islam n’a pas sa place en Suisse. Trente-huit pour cent pensent le contraire. Pour 80% des Helvètes, les valeurs chrétiennes font partie de l’identité suisse.
Le sondage a été réalisé en ligne en se basant sur 15.617 réponses pondérées selon des variables démographiques, géographiques et politiques. La marge d’erreur est de +/-1,2%.
Nous sommes en France en 2016, deux éléments plein de promesses qui pourraient laisser croire à un observateur peu averti que la pratique d’une religion dans le respect de la loi ne pose pas question. Mais les multiples attentats ont eu raison de la raison : des polémiques inattendues ont surgi, des politiques ont travesti la définition de la laïcité. On en a même entendu vouloir interdire le port de tout signe religieux dans l’espace public au nom de cette laïcité détournée…
Est-il donc vraiment étonnant de voir un député Les Républicains se demander très officiellement sous quelles conditions on peut être musulman et Français, comme si le fait de croire en Allah rendait impossible la vie en République ? C’est après tout la thèse de nombreuses personnalités de droite et d’extrême droite. Éric Zemmour, en pleine promo d’un livre qu’il n’a pas très bien relu, le répète à peu près partout ces temps-ci.
Fin août, Guillaume Larrivé, député LR de l’Yonne, a ainsi déposé une proposition de loi relative à la transparence de l’exercice public des cultes dont l’un des premiers objectifs est de dissoudre les « associations régies par la loi du 1er juillet 1901 assurant l’exercice public d’un culte » et d’interdire « tout financement direct ou indirect par des fonds étrangers d’une association régie par la loi du 9 décembre 1905 ».
C’est dans un long exposé des motifs de sa proposition de loi que Guillaume Larrivé pose cette question :
À quelles conditions peut-on être à la fois musulman et Français ?
Une interrogation à laquelle l’élu LR commence par répondre en donnant des exemples, rappelant que de nombreux soldats musulmans ont combattu pour la France durant la Première Guerre mondiale. « Des musulmans ont vécu en Français au point de savoir mourir comme tels : Français, oui, par le sang versé », écrit Guillaume Larrivé.
Ce premier exemple créé un sentiment étrange, comme si un musulman ne pouvait être français que s’il mourrait pour la France… Mais le député parle aussi des « milliers d’ouvriers maghrébins venus travailler dans les industries françaises des trente glorieuses ». « Ces travailleurs d’hier, devenus les chibanis d’aujourd’hui, ont conservé discrètement leurs racines musulmanes et cherchaient à vivre paisiblement parmi les Français », ajoute-t-il.
Mais les temps ont changé et aujourd’hui, un député LR se pose la question de savoir sous quelle condition un musulman peut être Français. Il ajoute :
La triste vérité est que la possibilité de vivre en Français et en musulman ne va, aujourd’hui, plus de soi ; c’est une réalité qui continue, certes, à être vécue tranquillement par un grand nombre de Français ayant une culture arabo-musulmane, une sensibilité et une pratique plus ou moins religieuses ; mais c’est précisément ce que contestent radicalement et violemment les tenants de l’islamisme, c’est-à-dire de l’islam politique. […] Aussi, la première condition d’une réponse nationale à la question musulmane doit être le refus absolu de l’islam politique, non seulement dans sa fin totalitaire mais aussi dans ses moyens préliminaires.
Le terme même de « question musulmane » interpelle. Sans vouloir céder à la tentation du point Godwin, il est étonnant de voir le mot « question » accolé à un adjectif qualificatif désignant une religion…
Cette base posée, Guillaume Larrivé s’indigne qu’en France, les esprits aient été « embrumés par l’obsession de la tolérance, qui se plaît à relativiser toute chose et à tolérer jusqu’à l’intolérable ». « Cette idéologie se décline avec la stupide thèse ‘pasdamalgamiste’ qui consiste à bêler que l’islamisme n’a strictement, jamais, nulle part, aucun lien d’aucune sorte avec l’islam », poursuit-il, reprenant à son compte la critique du #PASDAMALGAME née sur les rives de l’extrême droite et largement répandue aujourd’hui à droite.
Que nous dit Guillaume Larrivé ? Que pour être musulman et Français, il faut être discret et refuser l’islam politique. En contrepartie, la France ne doit rien faire qui pourrait aller dans le sens d’une meilleure intégration de l’islam. Car ceci serait, pour lui, la porte ouverte à l’islam politique. Il poursuit :
Nous ne partageons en rien l’avis de ceux qui, ayant plus ou moins lu Pierre Manent, voudraient que la République française reconnaisse comme telle une minorité musulmane et négocie un contrat avec l’islam en France, en acceptant des concessions et une sorte de partage entre notre loi et leur charia. Comme si la soumission était l’avenir et s’il fallait se résoudre à collaborer, en organisant le cloisonnement de l’espace public avant peut-être de négocier, demain, la taille de la burqa ou du niqab ! On ne s’opposera pas à ceux qui veulent gouverner au nom d’Allah en décidant de gouverner avec Allah..
Sur le plateau de Jean-Jacques Bourdin, le vice-président du Front national Florian Philippot a développé les positions du parti d’extrême-droite sur la question de la laïcité. Selon le député européen, le FN prévoit, en cas d’accession au pouvoir, d‘interdire tous les signes religieux ostentatoires dans l’espace public, rue comprise.
« Nous allons étendre la loi de 2004. On s‘est rendu compte qu’elle était excellente. Nous allons la faire appliquer dans la rue. Le voile, la grande croix, la kippa. Pour que ce soit constitutionnel, il faut que ça concerne les signes religieux ostensibles » selon Florian Philippot.
Pour autant, pas question pour le proche de Marine Le Pen d’interdire les processions religieuses ou le port par le personnel religieux de tels signes.
Les catholiques français sont réputés papistes, mais cela n’a pas empêché certains d’entre eux d’être interloqués par les propos récents de François sur l’islam.
« Je n’aime pas parler de violence islamique. (…) Si je parlais de violence islamique, je devrais également parler de violence catholique. (…) Dans presque toutes les religions, il y a toujours un petit groupe fondamentaliste. (…) Il n’est pas juste d’identifier l’islam avec la violence. Ce n’est pas juste et ce n’est pas vrai ! »
Certains catholiques ont été heurtés par ce qu’ils ont perçu comme un déni des motivations djihadistes des deux jeunes assassins du prêtre catholique tué en plein culte. Or, cet attentat à la charge symbolique dévastatrice est survenu dans un contexte marqué, depuis plusieurs mois, par une défiance croissante des catholiques, notamment pratiquants, envers l’islam, indique une étude de l’IFOP, sur la base de sondages effectués ces dernières années, et en particulier depuis les attentats de janvier et de novembre 2015. Controverses incessantes dans le débat public autour des signes visibles de l’islam, crise migratoire et attentats ont tissé une trame qui inquiète plus particulièrement la composante catholique du pays.
Quelques jours après le meurtre du Père Jacques Hamel dans une église de Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime), les propos du pape qui ne trouvait pas « juste d’identifier l’islam avec la violence » ont choqué des catholiques.
« L’idée d’une concurrence, d’une asymétrie entre la religion catholique, historique mais en déclin démographique, et un islam perçu comme en pleine dynamique démographique » contribuerait à dégrader l’image de l’islam davantage aux yeux des catholiques pratiquants que pour reste de la population, avance Jérôme Fourquet. Cette sourde inquiétude pourrait favoriser des crispations autour des récents propos du pape François sur l’islam.
Initialement, pourtant, les catholiques se définissant comme pratiquants étaient légèrement plus tolérants que la moyenne des Français envers les signes de la visibilité de l’islam, comme le port du voile à l’école et, dans une moindre mesure, la construction de mosquées. Mais cette relative ouverture aux manifestations de religiosité de la part des adeptes de la confession historiquement majoritaire s’est effacée ces dernières années, au point d’être aujourd’hui inférieure à celle de la moyenne nationale.
Le décrochage entre les catholiques pratiquants et l’ensemble des Français est spectaculairement mis en évidence par la question de l’« amalgame » entre musulmans et « islamistes radicaux ».
En février 2015, après les tueries de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher, les catholiques pratiquants ne se distinguaient presque pas du reste des Français […] Mesuré immédiatement après l’assassinat du Père Jacques Hamel, après la série d’attentats qui l’ont précédé, l’équilibre n’a pas changé dans l’ensemble de la population. En revanche, la part des catholiques refusant l’amalgame a reculé de 15 points et celle considérant l’islam comme « une menace » a progressé de 12 points.
Ce sont aussi ces catholiques « culturels », éloignés de toute pratique, qui font le plus de différence entre l’accueil de chrétiens d’Orient et celui des migrants en général. «Chez eux, note M. Fourquet, le devoir de miséricorde ne contrebalance pas l’inquiétude sécuritaire et identitaire. » Et ils semblent imperméables aux paroles du chef de l’Eglise catholique.