L’islamophobie est une «imposture» : L’Observatoire contre l’islamophobie du CFCM cesse le contact avec la Licra

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La Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (Licra), au travers de son président Alain Jakubowicz, veut « reprendre le combat contre cette imposture qu’est le concept d’islamophobie »

A ses yeux, « le concept d’islamophobie est un détournement de la lutte contre le racisme antimusulman qui n’a rien à voir avec l’antiracisme ». Ces mots, extraits de tweets publiés samedi 5 novembre, ont été relayés lors du colloque « Faux amis de la laïcité et idiots utiles » organisé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale par le Comité Laïcité et République et la Licra.

Depuis, les critiques pleuvent contre l’organisation antiraciste. L’Observatoire national contre l’islamophobie, rattaché au Conseil français du culte musulman (CFCM) a réagi, mardi 8 novembre, pour dénoncer une « phrase-bombe » de la Licra « qui risque d’ouvrir un fossé entre les différentes composantes de notre pays et de construire un mur, principalement entre les citoyens français de confession ou de culture musulmane d’une part et les citoyens français de confession ou de culture juive d’autre part ». L’instance annonce « cesser, à partir de ce jour, tout échange ou contact avec la LICRA tant qu’elle ne revient pas sur sa position qui a soulevé au sein des associations musulmanes et autres, un tollé général ».

« Il se permet de nier le phénomène réel »

Selon le président Abdallah Zekri, Alain Jakubowicz « n’est plus désormais crédible pour parler du racisme, car il fait une distinction entre les formes de discrimination. Il se permet de nier le phénomène réel et combien (il est) inquiétant. Le président de la LICRA a-t-il oublié que son rôle est de réunir le plus grand nombre de citoyens contre tous les racismes et non de cliver l’opinion et de diviser les différentes communautés culturelles ? ».

 


L’islamophobie est une «imposture» : le président de la Licra fait polémique

Dans une série de tweets postés ce week-end, le président de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme condamne le concept d’islamophobie…

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L’islamophobie : réalité ou vue de l’esprit ? Ce week-end, un tweet publié par le président de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) a mis le feu aux poudres. Sur le réseau social, Alain Jakubowicz appelle à « reprendre le combat contre cette imposture qu’est le concept d’islamophobie ». Des propos qui n’ont pas manqué de susciter la controverse.

Un débat sémantique qui fait débat

Pour le président de la Licra, il faudrait, pour être juste sur le plan sémantique, parler de « racisme anti-musulmans », l’islamophobie n’étant à son sens pas une notion évidente, mais plutôt « un détournement de la lutte contre le racisme anti-musulmans qui n’a rien à voir avec l’antiracisme ».

Si le président de la Licra rejette en bloc la notion d’islamophobie, pour la Ligue des droits de l’homme (LDH), le terme, « bien qu’il provoque un certain nombre de polémiques, est assez largement utilisé et compris dans le débat public, souligne Françoise Dumont, la présidente de l’association. Ce terme est même utilisé par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), qui n’est pas réputée pour sa complaisance ou son impartialité. » D’ailleurs, l’association indique utiliser ce terme : « si cela permet de mieux décrire un certain nombre d’actes violents, discriminants ou stigmatisants à l’égard des Français de confession musulmane, je ne vois pas où est le problème », poursuit Françoise Dumont.

Du côté de l’Observatoire de la laïcité, l’instance placée sous l’autorité de Matignon, on se refuse à « entrer dans un débat sémantique sur l’islamophobie – typiquement français – qui éloigne des véritables problèmes, estime son rapporteur général, Nicolas Cadène. En revanche, il n’est pas question de transiger sur le fait que l’on doit condamner toutes les violences à l’égard des Français au motif qu’ils sont musulmans ».

« C’est jeter de l’huile sur le feu »

Dans le milieu des associations antiracistes, le positionnement d’Alain Jakubowicz passe mal et laisse perplexe. « Dans le contexte actuel, c’est jeter de l’huile sur le feu », regrette Françoise Dumont. D’autant que, pour la présidente de la LDH, « lancer de telles polémiques sur Twitter, où les messages courts sont forcément lapidaires, est totalement inapproprié en général, et en particulier de la part du président de la Licra. Qu’il refuse d’utiliser ce terme est une chose, qu’il se lance dans une polémique sur ce réseau social en est une autre. »

Dans un contexte « extrêmement tendu par rapport à ces questions-là, il faut être conscient qu’il ne faut pas tenir de propos risquant d’attiser davantage les tensions, recommande Françoise Dumont. Depuis l’entrée en vigueur de l’état d’urgence, la communauté musulmane a été très visée. Quand on est animé par le vivre ensemble, il ne faut pas jouer avec ça ».

Outré par le positionnement d’Alain Jakubowicz, le journaliste Claude Askolovitch lui a fait savoir sa façon de penser sur Twitter.

Pour les défenseurs de la laïcité ou des droits de l’homme, ce débat sémantique ne doit pas nier la réalité des actes antimusulmans ni la souffrance des musulmans de France. Que l’on parle d’islamophobie ou de racisme antimusulman, « la stigmatisation de la communauté musulmane, en particulier des femmes voilées, n’est pas une simple vue de l’esprit, elle est réelle », insiste Françoise Dumont. « De fait, les actes antimusulmans sont en hausse, rappelle Nicolas Cadène. Il faut lutter contre au même titre qu’il faut lutter contre les actes racistes et antisémites ».

20 Minutes

Communautariste toi-même ! réponse a Alain Jakubowicz par Julien Talpin

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On déplore une supposée «dépolitisation des banlieues». Drôle de procédé que de chercher à faire taire des acteurs qui mènent un combat politique.

Des Noirs qui se mobilisent pour les droits des Noirs, des musulmans qui s’organisent pour ceux des musulmans… la République est en danger ! Le communautarisme est en marche. Quoi ? Les premiers concernés s’engagent pour faire valoir leurs droits ! Où va-t-on ? Des femmes féministes (certaines défendaient même la non-mixité de leurs organisations dans les années 70) : communautarisme ! Martin Luther King ? Communautariste !

Mais non, pas du tout, on n’a rien compris, là n’est pas le problème. Qui tient à la segmentation des luttes antiracistes, le fait de créer des organisations spécifiques pour chacune des causes. Ces contempteurs devraient donc saluer la Marche de la dignité, organisée en octobre 2015, qui les rassemblait toutes ! Ils devraient aussi soutenir le collectif Stop le contrôle au faciès, qui en rassemble un certain nombre.

Faut-il en outre rappeler que les mouvements qualifiés de «communautaires» sont eux-mêmes très divers en interne : contre l’islamophobie, on peut trouver des personnes de toutes origines, principalement musulmanes, certes. Personne n’interdit en outre à des Blancs d’y prendre part. Ils ne doivent simplement pas prendre toute la place. Mais peut-être le problème est-il là.

Ces mouvements sont nourris de réflexions historiques et politiques, ils ont vu les impasses et les trahisons de l’antiracisme soi-disant universaliste, ils ont appris qu’en dehors de la France, aux Etats-Unis par exemple, des mouvements antiracistes avaient aussi vu se reproduire des rapports de domination. Les minorités s’y retrouvaient de nouveau dans l’ombre, à l’instar des femmes, derrière les hommes dans certains mouvements féministes, ou des femmes noires derrière les femmes blanches, ce qui donna naissance au Black Feminism. Oui, les formes de domination sont plurielles, intersectionnelles, entre classe, race et genre. Elles requièrent donc des luttes spécifiques et leur convergence.

Ces collectifs se mobilisent pour une valeur universaliste : l’égalité ! Face au déni des discriminations systémiques qui structurent la société française, ces militants réclament l’égalité pour tous, ce qui suppose d’abord de reconnaître et dénoncer le racisme dont sont victimes certaines catégories de population. Pas de «victimisation» ici : la simple demande que soient entendus les résultats d’études scientifiques incontestables. Le fait qu’à CV égal, un homme perçu comme musulman a, au minimum, deux fois moins de chances d’être embauché, d’accéder à un logement. Voilà l’islamophobie !

Il ne faut pas s’arrêter à la «phobie» de l’islamophobie. Personne n’a jamais prétendu que l’homophobie n’était qu’une affaire de «peur» des homosexuels. On range aussi dans cette catégorie les ratonnades qu’ils ou elles subissent ou les discriminations à leur encontre. Islamophobie est synonyme de racisme antimusulman. Pourquoi préférer ce terme alors ? Peut-être parce qu’il est utilisé dans tous les pays du monde sans susciter de tels débats. Le terme d’islamophobie va bien au-delà de la «peur» ou de la «haine» contre l’islam et les musulmans – l’islamophobie n’est pas qu’une opinion – elle se traduit par une essentialisation des musulmans et par des pratiques discriminatoires systémiques contre ceux qui sont perçus comme musulmans, sur le marché du travail, du logement, dans l’orientation scolairequi peuvent aller jusqu’à la violence.

On peut à la fois lutter contre l’islamophobie et critiquer non pas «l’islam» ou «les musulmans» (ainsi essentialisés), mais certains de ses courants ou de ses pratiques, ce que les musulmans passent d’ailleurs leur temps à faire (il y a des désaccords, des critiques, des débats, ce qui est normal).

Alors qu’on déplore en permanence une supposée «dépolitisation des banlieues», drôle de procédé que de chercher à faire taire des acteurs qui mènent un combat fondamentalement politique. Des replis communautaires existent dans la société française, mais ces mouvements antiracistes, par l’expression de l’injustice qu’ils permettent, en constituent le meilleur rempart. Plutôt que d’y voir des mobilisations communautaristes et des dangers pour la République, les progressistes patentés devraient percevoir dans ces mouvements un puissant rappel à une exigence fondamentale constamment bafouée : l’égalité.

Libération

Législatives : la Licra demande aux candidats de s’engager à se désister pour contrer le FN

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Dans un communiqué publié jeudi, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme dit « se mobiliser pour faire battre l’extrême droite dans les urnes lors des élections législatives les 10 et 17 juin » et « donne l’alerte sur le risque de voir des candidats d’extrême droite entrer à l’Assemblée nationale ».

La Licra « demande donc à tous les candidats de s’engager publiquement en signant son « appel aux convergences républicaines pour faire battre le Front national » et fait remettre ce jeudi le texte aux sièges des principaux partis républicains en leur demandant de le diffuser largement dans les circonscriptions auprès de leurs candidats en les invitant à le signer. La liste des signataires sera publiée sur le site de la licra.

Le Monde