La « France sans islam » de Philippe de Villiers: « Un racisme à peine déguisé »

Dans un entretien au magazine Valeurs Actuelles, le président du Mouvement pour la France Philippe de Villiers évoque sa volonté de voir « une France sans islam ». Notre contributeur, l’avocat et directeur du site Cultures&Croyances Asif Arif, met en garde devant le danger que représentent de tels propos.

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Depuis quelques semaines, on sentait une certaine accalmie sur la question tumultueuse de l’islam en France ou l’islam de France. Les médias étaient préoccupés par la montée de Donald Trump et par la question migratoire, sauf Valeurs Actuelles qui, en couverture de son dernier numéro, proposait un entretien exclusif avec Philippe de Villiers évoquant « [sa] France sans islam ».

Lecteur du Coran à ses heures perdues, Philippe de Villiers ne semble pas avoir tiré grand-chose des enseignements fraternels qui en découlent. Au contraire, il semble que ses conceptions moyenâgeuses de la France ont fait résurgence sur son caractère. Bien plus que commenter ses opinions sur l’islam, il s’agit en réalité de penser, aussi intellectuellement que possible, une France sans l’islam.

Viser l’islam, mais pas les musulmans

Ce titre se pose de multiples questions. Que veut-il dire par là? Parle-t-il d’un pays sans mosquée, sans patrimoine culturel oriental? Faut-il s’en baser seulement au Puy du Fou? Comment concevoir une France sans islam mais avec des musulmans? Cela revient étrangement à faire choisir les musulmans entre islam et République, alors que les deux sont compatibles.

La République offre à l’islam une palette de libertés qu’elle ne saurait gérer sans remettre en cause ses fondements: la liberté de conscience et la liberté de religion. Penser un pays comme la France sans islam, c’est rêver, comme Donald Trump, d’une Amérique sans migrants! Outre l’écho populiste que trouve cette affirmation de Philippe de Villiers, elle ne porte que très peu d’intérêt pratique.

Une affirmation illicite

Il est impossible de concevoir une telle France: l’islam fait partie intégrante du patrimoine religieux du pays. Cette sortie fait suite à beaucoup d’autres, toutes preuves d’un racisme à peine déguisé contre les populations immigrées ou nées sur le territoire français et d’origine africaine ou maghrébine.  

Il faut que ces Unes cessent, car elles portent atteinte à notre pacte républicain. Elles sont une atteinte continue à l’un des piliers de notre société, à savoir, la fraternité. Pas un seul discours politique ne fait l’effort de prendre le recul nécessaire et proportionné nécessaire au traitement du fait religieux. Cette hystérie continuelle dans les débats politiques ne peut plus durer.

Elle enlève toute crédibilité aux partis républicains et donne de la force à deux entités redoutées par la République: Daech d’un côté et le Front national de l’autre, l’avers et l’envers de la même pièce. Ils contribuent, tous les deux, à diviser notre société en faisant croître et en montant en épingle nos différences. Il est urgent que la République prenne le dessus et que de tels propos soient sanctionnés, au nom de notre fraternité républicaine.

L’Express